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A Lille, les comédiens relèvent le gant


ATELIER - «Si tu mets une jambe là et que tu te lances fort, tu vas y arriver.» Debout sur les cordes du ring de la salle de catch de Bailleul, Frédéric Kontengome, comédien et judoka, se jette en saut périlleux par-dessus Dana Augustin, acrobate. Voix douce de videur, bras tatoués en couleur, le catcheur Daniel Jalbert, «Pierre Booster Fontaine» sur les rings, explique les secrets du catch : «Quand tu es près d’elle, ce temps-là sert à parler. Tu la préviens que tu l’envoies dans les cordes.» Ça s'appelle Les maîtres fous, c'est ce soir sur un ring de catch, à la Maison Folie de Lille-Wazemmes, dans le cadre de la Quinzaine de l'Entorse.

Marteau-pilon. Il l’envoie, elle rebondit d’un côté à l’autre du ring, se marre. Le catch est un spectacle. Construit, presque à la seconde près, ou improvisé autour de figures : le bras à la volée, le saut chassé, la corde à linge, le marteau-pilon. Il y a un gentil et un méchant, on ne se fait pas mal, on simule la douleur et on sait qui va gagner. Près du catcheur-prof, une metteure en scène, Aurélie Sorrel-Cros, et Alexandre del Perugia, «pédagogue du mouvement». L’atelier (pas un spectacle, précisent les organisateurs), mêlant catch et arts du spectacle, s’appelle les Maîtres fous ; il est restitué ce soir, en première partie d’un vrai gala de catch de l’International Catch Wrestling Alliance de Bailleul, dans le cadre de la Quinzaine de l’Entorse. Une idée de la Maison Folie de Wazemmes, à Lille : des spectacles, expos, films, ateliers, à la croisée du sport et de la culture.

Dana Augustin s’enroule autour du «ruban», le long drap blanc qui lui sert de corde d’acrobate. Du haut de son fil, comme une araignée qui pend au plafond, elle attaque Frédéric. Il regardait Flesh Gordon à la télé avec son père. «J’aimais les gentils.» Daniel, lui, joue toujours le méchant, «le méchant qui ne respecte pas les règles, l’arbitre, les gens ; le sale type, le rebelle».

«On en est au tout début de cette recherche autour du catch, on va tester le rapport au public» , raconte Aurélie Sorrel-Cros. Cela pourrait donner un vrai spectacle avec l’Hostellerie de Pontempeyrat, dans la Haute-Loire. «On est au service du catch, dit Alexandre. J’ai plus envie d’apprendre que de leur apprendre.» Chez les catcheurs, Delphine, alias «Bulla Punk», s’acharne sur la tignasse de «Sturrie». Elle lui tire les tifs en arrière, il serre les dents. Elle le soulève. Au pied du ring, les comédiens lillois Janie Follet, Michel et Corinne Masiero, Sandrine Chatelain, se marrent : «Va-z-y tiote ! Tue-le !» Ils discutent scénario avec Daniel. Il leur explique qu’ils doivent chacun se créer un personnage ; ils se donnent des noms de scène : «Magnolia Faure», «l’étrangleur de Wazemmes». En ch’ti : «Nellie Oleson à ch’beffro.» (1) «Bon, alors, la méchante, c’est elle ; la gentille, elle.»

Roulades. En plus du combat, ils veulent jouer les soigneurs, infirmières, commentateurs sportifs. Janie : «J’ai plus confiance à catcher avec un mec de chez vous qu’avec mes copains.» Daniel préfère que les comédiens catchent entre eux. Julien, lutteur à l’OS-Fives de Lille, lycéen en mécanique, participe aussi : «Moi, je veux bien faire soigneur de Janie, c’est quoi, soigneur ?» Corinne : «Moi, je commente, mais je peux foutre sur la gueule quand même ?»

La bagarre commence, c’est Janie contre Sandrine. Comment faire croire qu’on se fait mal sans faire mal ? Fous rires. Roulades spectaculaires. Janie prend la tête de Sandrine : «Attends, je tourne comment, là, déjà ?» Daniel montre les prises avec sa compagne Delphine. Il leur apprend comment trembler pour faire croire à la puissance. Elle lui donne un coup au bras, il s’aplatit dans un bruit de tonnerre sur le ring. Les comédiens hochent la tête, médusés.

Haydée Sabéran

Photo Olivier Touron

Les Maîtres fous suivi du gala de catch. Maison Folie de Wazemmes, à Lille. Samedi 31 mai, 19 heures, 8 et 5 euros ou un coupon crédits-loisirs.

(1) «Nellie-elle-sonne-au-beffroi.»