Comparateur de rachat de crédit

Sangatte : «Au prochain coup de tabac, la mer passe»


TERRE - Le même scénario-catastrophe. Ce qui s'est passé dans la nuit de samedi à dimanche en Vendée, ce sont les craintes exposées lors d'un colloque le 29 janvier à Calais sur l'impact du réchauffement climatique sur le littoral Nord-Pas-de-Calais. Un tiers des digues sont en mauvais état, en particulier celle de Sangatte, qui s'est effondrée partiellement début février. Depuis, elle a été colmatée, mais elle reste dangereuse, selon Yves Foissey, membre démissionnaire du syndicat des dunes et des digues du Pas-de-Calais, très inquiet.

Craignez-vous sur le littoral du Nord-Pas-de-Calais la même montée de la mer qu'en Vendée ?
Tout à fait. La digue de Sangatte est dans un état déplorable. Elle s'est effondrée à un endroit début février. Elle est en béton et en moëllons. Les moëllons, c'est de la craie. Elle a été minée par le temps, elle s'effrite. Au prochain coup de tabac, la mer passe. Les mêmes coefficients, la même tempête, mais avec un vent au Nord et non en plein Ouest, je crains pour la digue. Si elle craque, on peut avoir un mètre d'eau jusqu'à Saint-Omer, les terres étant en dessous ou au même niveau que la mer. C'était pareil en Vendée, non, c'est le marais poitevin ?

En fait, entre Dunkerque et Calais, c'est un grand polder, des terres gagnées sur la mer depuis le Moyen-Age grâce à un système de digues et de wateringues, des canaux d'évacuation des eaux. Comment est organisé son entretien ?
Je faisais partie du syndicat des dunes et des digues qui devait gérer l'entretien et la rénovation des digues, pour protéger les terres de la mer. On prélevait une taxe minime dans chaque commune susceptible d'être inondées, on avait environ 200 000 francs de cotisations par an (28 700 euros). On n'avait pas assez d'argent. On a tiré la sonnette d'alarme, on a soulevé le problème aux différents sous-préfets de Calais qui se sont succédé. Dans la zone inondable, on a la plus grande centrale nucléaire d'Europe, Gravelines. L'Etat ne voulait rien savoir. On n'avait pas les moyens d'agir financièrement, alors on a tous démissionné il y a trois ans. On ne voulait pas être responsable d'une catastrophe, je ne voulais pas finir mes jours en prison. Tout cela, c'était bien avant la Vendée !

Tout de même, une étude financée par l'Etat recense les digues et contrôle leur état...
Oui, il y a des études. J'ai étudié longtemps et je n'ai pas eu mon bac. Des études, c'est très bien, il faut en faire avant de dépenser de l'argent. Seulement, ce n'est pas la première étude qu'on voit. On construit à tout va, on imperméabilise les terrains. Regardez la zone commerciale du Tunnel sous la Manche, avec Auchan, des hôtels. Cela, ça ramène beaucoup d'eau en peu de temps. Je ne sais pas qui va prendre le taureau par les cornes, mais avec le réchauffement climatique en plus, on est de plus en plus inquiet. Nicolas Sarkozy veut agir. C'est bien d'agir en curatif, c'est mieux d'agir en préventif. Cela serait moins douloureux pour les personnes, qui vont devoir aller bientôt à un enterrement. 

Recueilli par Stéphanie Maurice