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Identité nationale : «on demande son avis à n'importe qui»


POLITIQUE - La Ligue des droits de l'Homme du Nord vient d'annoncer qu'elle ne participera pas aux débats sur l'identité nationale. Le premier du genre se tient jeudi à Dunkerque, à 18h, au Pavillon des Maquettes du grand port maritime. Gérard Minet, secrétaire régional, donne les raisons de ce choix.

Pourquoi avez-vous refusé l'invitation du préfet ?
C'est un débat inopportun, et qui ne correspond à rien sur le fond. Je le vois comme une manœuvre à l'approche des élections régionales.

Que voulez-vous dire, en affirmant qu'il ne correspond à rien sur le fond ?
D'abord, l'identité nationale, ça n'existe pas en tant que tel. L'identité de la France se construit au fur et à mesure : demain elle sera différente d'aujourd'hui. Ce fut nos ancêtres les Gaulois, Clovis, les Arabes arrêtés à Poitiers, les brassages de population venues travailler en France, Italiens, Polonais, Portugais, Maghrébins... Vouloir définir l'identité française, c'est la figer.

Qu'est-ce qu'être français, selon vous ?
Se sentir français, c'est se référer à des valeurs mises en avant par la France, et non à une origine ethnique. Ces valeurs, ce sont celles de la République, Liberté, Egalité, Fraternité. C'est aussi une certaine conception de la citoyenneté, sans référence à des communautés. Or, ce débat sur l'identité nationale est lancé par le ministère de l'Immigration, ce qui veut dire qu'il se construit a contrario des étrangers : on est français parce que les immigrés ne le sont pas. Historiquement, cela ne tient pas. Thomas Paine* a eu la nationalité française parce que les idées qu'il défendait étaient celle de la Révolution française. Cette spécificité nationale, ce contrat social, se définit à partir de la Révolution, avec le passage de la notion de sujet à celle de citoyen.

Et aussi de la notion de droit du sang à celle de droit du sol...
En effet. Aujourd'hui, la seule façon de se savoir français légalement, c'est d'avoir deux générations nées sur le sol français. Soi-même et l'un de ses parents, par exemple. Ce qui est d'ailleurs un recul, né des réformes Pasqua. Avant, si on était né sur le sol français, quel que soit la nationalité de ses parents, on était automatiquement français.

Vous avancez une troisième critique à propos de ce débat sur l'identité nationale...
Quand Pasqua avait montré sa proposition de loi en 1993, il y avait eu un tollé, et une commission pluraliste avait été nommée, qui avait auditionné tous les responsables associatifs, les historiens, les sociologues...Cet échange avait abouti sur des choses plus raisonnables, même si elles marquaient un recul. De toute façon, il y avait une volonté gouvernementale de restreindre l'accès à la nationalité française. Aujourd'hui, rien de tel. On demande son avis à n'importe qui, dans des réunions qui portent sur n'importe quoi. On y entend des propos racistes, dans un contexte qui est celui de l'affaire des minarets en Suisse. C'est un faux débat, dangereux, créé pour accaparer un électorat en utilisant les idées du Front national.

Recueilli par Stéphanie Maurice