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La grève du lait menace, la mobilisation commence


AGRICULTURE - L'association des producteurs de lait indépendants (Apli) multiplie les réunions pour mobiliser les troupes, comme ce soir, par exemple, à Samer, près de Boulogne-sur-Mer. Elle rêve d'une grève du lait européenne, au nez et à la  barbe de la FDSEA, le principal syndicat agricole, pour arracher la baisse des quotas laitiers et un meilleur prix de vente. Le porte-parole de la Confédération paysannne Nord-Pas-de-Calais est sceptique :"Je ne crois pas qu'il y aura assez de solidarité dans le monde agricole." Isabelle Dubois, déléguée Apli Pas-de-Calais, parle, elle, d'une "grève imminente".

"Ce qu'on demande, c'est vivre de notre métier", soupire Isabelle Dubois, déléguée Apli. "Cette année, en moyenne, on a touché 280 euros les mille litres, alors que nos coûts de production oscillent entre 280 et 330 euros, et encore sans la main d'oeuvre". Vente à perte, donc. Antoine Jean, porte-parole de la confédération paysanne, partage le même constat. L'origine du mal, pour les deux ? Les quotas de l'Union européenne qui obligent à une surproduction de 5% chaque année. "Les laiteries ne savent pas quoi faire du lait en trop, elles le transforment en lait en poudre, le stockent", explique Isabelle Dubois. Elle conclut : "On produit du lait inutile". Antoine Jean complète : "La commission européenne nous dit qu'il faut penser au marché mondial, mais c'est un marché de dupes : le cours du lait en poudre s'est effondré." Ce qu'ils veulent ? "Il faut que la production soit adaptée à la consommation européenne, que les prix soient indexés aux coûts de production", insiste Isabelle Dubois. "Mais nous ne voulons pas voir le consommateur payer plus cher. Il y a assez d'argent dans la filière pour que tout le monde soit heureux."
Mais sur les moyens à déployer, les deux diffèrent. Antoine Jean craint que la grève soit inefficace, "si les gros producteurs ne la suivent pas. Ils continueront à livrer 10 à 12 000 litres de lait tous les trois jours, et les laiteries seront contentes car elles auront moins de lait à traiter." Pour lui, les gros producteurs "s'en foutent des prix" : l'Union européenne donne 35 euros de subvention par mille litres produits, ce qui est la marge sur laquelle vivent les éleveurs. "Plus vous avez de litrages, plus vous gagnez", résume Antoine Jean. La crise du lait, explique-t-il, c'est le drame des petites exploitations qui vont disparaître, tandis qu'un mouvement de concentration se met en place.
Du côté de la FDSEA, on défend l'accord obtenu, qui oblige à un prix minimum de 280 euros. Et si on est d'accord sur la nécessité de baisser la production, on rappelle que le système des quotas arrive à sa fin. L'avenir serait plutôt à "la contractualisation avec les différentes entreprises sur un bassin laitier donné", explique Philippe Catieaux.Il affirme qu'il faut être attentif aux exploitations en difficulté mais parie pour une baisse des charges l'année prochaine, avec la baisse du prix des céréales pour nourrir les bêtes. Stratégie du dos rond, en attendant des jours meilleurs.
Isabelle Dubois, elle, croit à la mobilisation des producteurs de lait, estime la grève "imminente", et rassure d'ores et déjà les consommateurs : "Il y aura des dons de lait dans les grandes villes, et les gens pourront de toute façon venir chercher le lait dans nos fermes." S'il y a pénurie, elle ne toucherait que les grandes surfaces.

S.M.