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Faurecia, la paie sociale


GREVE - Les pneus ont arrêté de brûler, la direction de Faurecia s’est remise à communiquer et les ouvriers ont repris le chemin de leur atelier ce matin. Cela faisait trois semaines que l’usine d’Auchel (Pas-de-Calais) de l’équipementier automobile était à l’arrêt.

Que des dizaines de vigiles sécurisaient le bâtiment. Que les salariés en grève se relayaient, mais de l’autre côté des grilles. Marc venait «comme s[’il] prenai[t] [s]on poste», à 5 heures et repartait à 13 heures. L’équipe de l’après-midi le remplaçait alors, lui et ses collègues, au piquet de grève. Et ainsi de suite, en permanence.

«Acceptable». La direction a fini par plier en rendant le plan social, dévoilé début mars, un peu plus «acceptable». Les salariés réclamaient 50 000 euros de prime de départ, en plus des indemnités prévues par la loi. «Même si je retrouve du travail, je vais recommencer à zéro, avec un salaire de base», justifiait Marc, 41 ans dont vingt de boîte. Les salariés ont eu gain de cause. A chaque négociation, le groupe lâchait quelques milliers d’euros de plus, avertissant qu’il n’irait pas plus loin, avant de se contredire. Les grévistes (majoritaires à environ 300 sur 508 salariés) n’ont rien lâché, disposant comme arme de persuasion d’une production à l’arrêt. Ils ont même obtenu le maintien d’une partie du site, que Faurecia prévoyait de fermer, avec 90 emplois sauvés à la clé. «C’est rare qu’une fermeture d’usine ne soit pas validée, et c’est une victoire considérable», se félicite Jean-Michel Petit, de la CGT chimie.

Enfin, la direction a maintenu le transfert de 329 postes : 172 personnes seront mutées vers les sites de Marles-les-Mines et 157 vers celui de Hénin-Beaumont d’ici la mi-2010. «Indéniablement, il y a eu une pression des constructeurs sur Faurecia», estime Lionel Krawczyk, de la CGT chimie. Ce n’est pas la première fois que les donneurs d’ordre sont impliqués dans les conflits de leurs sous-traitants. En février, Eurostyle, fournisseur de garnitures pour les constructeurs et alors en redressement judiciaire, avait vu ses salariés bloquer la production. Pour «provoquer des pannes chez les constructeurs, faire pression» et améliorer leur plan social.

Bis repetita chez Faurecia à Auchel. Devant une usine bloquée, la direction avait fait envoyer des CRS fin avril, dans la nuit, pour permettre à des camions de venir chercher ce qu’il restait de stocks et les convoyer vers les sites de Onnaing (Toyota), Maubeuge (Renault), Gand (Volvo) et Sevelnord à Hordain (PSA/Fiat). Cela n’a pas suffi. Lundi, l’usine de Toyota renvoyait tous ses ouvriers de production chez eux en chômage partiel, faute de panneaux de porte à monter sur ses Yaris. Idem chez Renault Maubeuge qui produit des Kangoo. «Il y a 500 000 euros de pénalités à payer à Toyota par jour de production non livrée», rapporte Eric Pecqueur, délégué CGT à Toyota-Onnaing. «Faurecia ne paiera pas de pénalités à Renault, ils s’arrangeront avec des ristournes sur les prochaines livraisons», pense Thérèse Lecocq, déléguée CGT du site d’Auchel.

Muette. La direction de l’équipementier reste muette mais reconnaît l’existence de pénalités contractuelles avec des clients non approvisionnés. La veille du protocole de fin de conflit, Olivier Besancenot s’était rendu devant l’usine d’Auchel et avait appelé à une grève de tous les équipementiers pour «instaurer un rapport de force». «Il y en a qui gagnent», avait-il dit, citant les salariés de Toyota à Onnaing. Après deux semaines de grève en avril, ils avaient obtenu une indemnité à 95% de leur salaire en période de chômage partiel. Jeudi, les salariés d’Auchel ont, à leur tour, remporté une victoire.

Julia Pascual

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