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Samsonite : les repreneurs présumés voyous au tribunal


ÉCO-TERRE - Pour garder le moral dans leur usine occupée jour et nuit, elles tricotaient des écharpes, et racontaient des blagues. C'était en février 2007, à Hénin-Beaumont. Avant, leur usine s'appelait Samsonite, on y fabriquait des valises et des vanity-case. Quelques unes des 203 ouvrières faisaient visiter les ateliers à l'arrêt aux journalistes. Des candidats  à la présidentielle passaient. Les valises impeccables étaient encore sur les chaînes de montage prêtes à repartir. En septembre 2005, Samsonite avait cédé le site à un repreneur, «Energy Plast», et un an et demi plus tard, l'usine mourait debout. Les repreneurs sont jugés aujourd'hui à la 11ème chambre du Tribunal de grande instance de Paris. Ils auraient

Sur le banc, un ancien directeur du site, deux autres dirigeants et deux de leurs avocats. Ils risquent jusqu'à 10 ans de prison pour banqueroute par détournement d'actifs, et complicité de banqueroute.

Outre les conditions de reprises dures fixées par Samsonite, avec des contrats d'exclusivité léonins dont le site dépendait jusqu'à 80% (Libération du 16/02/07), les salariés avaient dû faire avec ces repreneurs. Les dirigeants d'Energy Plast avaient promis aux salariés et aux élus locaux de produire des panneaux solaires, et ne l'ont jamais fait, se contentant d’une activité de négoce de panneaux, marginale. Ils  avaient même promis de créer de nouveaux emplois. En fait, selon le Parquet de Paris, qui poursuit, les trois dirigeants auraient, en outre, siphonné 1,5 millions d'euros, notamment grâce à des «paiements de prestations de conseil non justifiées».

Les représentants des salariés, eux, pensent que Samsonite devrait être jugé aussi, pour complicité. Pour eux, le géant du bagage s'est payé un plan social pas cher. «C'est la thèse des salariés», répond le Parquet. «Nos investigations, elles, ne nous ont pas permis d'aller plus loin».

Le tribunal de grande instance de Béthune est allé plus loin, lui : le 25 mars dernier, il a annulé la vente de l’usine au repreneur (), en arguant de la nullité des contrats de cession.  «Il n’est pas contesté que [la société] a économisé le coût de la fermeture du site industriel, […] coût qui a été reporté sur la collectivité publique», indiquait le tribunal de Béthune dans son jugement. Me Fiodor Rilov, avocat des salariés : «c'était une première dans l'histoire du droit du travail» Le tribunal de Béthune n'a pas mis à exécution le jugement, en attendant l'appel, dont la date est encore inconnue.  «L'annulation de la vente de l'usine a des effets incalculables», ajoute l'avocat, «Les salariés sont réintégrés, et Energy Plast n'existe pas». En attendant, à Paris aujourd'hui, c'est Energy Plast que le Parquet poursuit. Le procès doit durer trois jours. A Hénin-Beaumont, l'usine n'existe plus.

Haydée Sabéran

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Photo Archives Reuters/Rossignol : François Bayrou, candidat Modem, en visite dans l'usine pendant la campagne présidentielle, le 10 avril 2007