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Au téléphone, Florence, depuis sa prison mexicaine


FAITS-DIVERS - Les journalistes sont assis autour du téléphone, on a mis le haut parleur. Elle appelle d'une cabine à carte, depuis sa prison de Mexico. Dans le bureau de son avocat lillois, elle improvise une conférence de presse téléphonique. Florence Cassez, 32 ans, originaire de Béthune, ancienne directrice de grand magasin à Calais, condamnée au Mexique pour enlèvement, clame son innocence.

Elle a été arrêtée le 8 décembre 2005 avec son ancien petit ami, Israël Vallarta, soupçonné d'appartenir à une bande spécialisée dans le kidnapping. Le jour de l'arrestation d'Israël, elle est à ses côtés. Le lendemain, la police organise une fausse arrestation d'eux deux à proximité de victimes d'enlèvements, sous l'œil des caméras, en direct à la télévision. Elle dit qu'elle ne savait rien des activités illicites de son ex. Depuis sa cellule, quelques mois plus tard, elle met en difficulté le responsable de l'enquête qui avait conduit son arrestation. En direct à la télévision elle annonce que son arrestation télévisée était bidonnée. Elle pense qu'aujourd'hui, sa condamnation -96 ans au total, 20 ans en réalité, la plus longue peine s'appliquant-, est le fruit de représailles de ce policier, devenu depuis ministre de l'Intérieur. Elle a fait appel. Le jugement -un réexamen du dossier, à huis clos, sans pièce nouvelle- doit être rendu dans un à deux ans. Interview.

Le quotidien
 . «Je ne sais pas comment je tiens. il y a des jours où la tête suit, mais plus le corps, des jours où le corps suit, plus la tête. (Elle rit). Mes journées? L'eau chaude s'arrête à 9h, alors à 8h, je suis prête. J'ai des cours, du sport, nettoyer la cellule, et voilà. Beaucoup de choses à faire, et pas grand chose à faire».

Le dossier. «Ce que je demande, c'est qu'on s'occupe de moi. Qu'on se plonge dans le dossier. Qu'on y voit les incohérences, et les preuves de mon innocence. Parmi les incohérences, il y a mon arrestation réelle, le jeudi 8, puis le grossier montage du vendredi 9, après plus de vingt heures pendant lesquelles j'ai été enlevée [par la police mexicaine, ndlr]. Il y a des victimes qui ne me reconnaissent pas, et puis qui me reconnaissent. Il y a une victime qui décrit mes mains comme jolies, douces, fines, blanches. Alors que j'ai des mains de travailleuses, pas fines, pleines de taches de rousseur».

Le pourquoi. «C'est tombé sur moi parce que j'étais au mauvais endroit au mauvais moment. Quand j'ai été arrêtée, les policiers m'ont dit que je n'avais rien à voir, que je serais juste entendue pour l'enquête. Et puis ils n'ont pas réussi à arrêter la bande. Alors, c'était génial, ils avaient sous la main une Française. Si j'avais été Américaine, ç'aurait été encore mieux».

L'ex. «Israël, mon frère le connaissait depuis cinq ans. Il me l'a présenté. Je n'ai jamais douté, ni pensé qu'il avait des activités illicites, comme vous dites. J'ai vécu en réalité deux mois avec lui [ils se sont vus pendant huit mois en tout, ndlr], et pendant ces deux mois, je n'étais plus avec lui, en fait. Ça ne m'intéressait pas ce qu'il faisait, j'étais persuadée qu'il était avec une autre personne. Il a reconnu devant les caméras ce qu'il avait fait. Il a dit que n'avais rien à voir là-dedans. Les deux dossiers ont été séparés depuis le départ. Il n'a pas encore été jugé. Israël est coupable, moi je suis innocente».

Le procès en appel. «[Que la justice mexicaine reconnaisse qu'elle a fait fausse route], c'est mon plus grand souhait. L'espoir fait vivre. C'est la seule chose qui fait que je me bats et que j'ai encore de la force».

Les soutiens. «J'ai entendu parler des pétitions sur internet. Je reçois énormément de courrier. J'ai même reçu un chronopost dans lequel on me disait que peut-être je ne recevrais pas cette lettre car je serais sortie avant! Ce n'est pas pareil quand ce sont mes parents qui m'en parlent. Ce n'est pas pareil que de recevoir une carte postale, avec une signature, de quelqu'un qui dit "je crois en vous". Les gardiens m'ont ramené des articles de journaux, ils m'ont dit "t'es sortie dans le journal, c'est génial que ton pays t'aide". J'ai envie d'y croire. Il y a des hauts et des bas, mais quand je reçois dix lettres le même jour, je ne me sens pas oubliée».

Recueilli par H.S.

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