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Eurotunnel : «Huit heures d'attente, jamais vu ça»


TRANSPORTS - Quatre Eurostars ont été bloqués dans le tunnel sous la Manche entre vendredi et samedi, avec 2 000 personnes à bord.  Sans compter les passagers retenus à Calais, qui attendaient de prendre avec leur voiture les navettes vers Douvres. En tout, dans un terminal enseveli par la neige, 5 000 personnes ont attendu toute la nuit. .Récit.

18h30, hier soir. La neige tombe régulièrement sur la chaussée de l'autoroute A16. On circule en escargot. L'accès au terminal du tunnel sous la Manche est facile, départ prévu, en retard, à 19h50. Dans l'espace duty free, déjà, toutes les tables sont occupées. Les hôtesses à l'accueil évoquent un déneigement en cours. Pizzas, paquets de chips, on meuble son ennui en mangeant.

20h30. Annonce, enfin. Les numéros N, M, O et P sont appelés à l'embarquement. On monte dans les voitures, direction la douane anglaise. On patiente avant de se garer dans les navettes. Certains sortent et s'offrent une bataille de boules de neige en prenant les camions à l'arrêt pour cible. C'est joyeux.

21h30. Ça y est, à bord ! La navette est complète, dans 30 minutes, l'Angleterre. Elle démarre, pour s'arrêter cinq minutes plus tard.

21h45. Le haut-parleur grésille. On colle l'oreille, ou presque, à la grille. Retard d'une heure. On se rencogne dans les voitures, résignés. Heureux que les wagons soient chauffés.

23h. Un des conducteurs passe, explique que des trains Eurostar sont bloqués sous le Channel. En plus, les aiguillages sont gelés. Il ne sait pas à quelle heure on pourra partir.

Minuit. Toujours à quai. Le conducteur est à côté d'une vieille dame de 93 ans, la famille s'inquiète. Il alerte ses supérieurs par talkie-walkie. Elle restera dans la rame jusqu'à la fin.

1h30 : les conducteurs se transforment en serveurs alertes, le café est arrivé, les sandwiches ne vont pas tarder. Ils essayent, sympas, toujours calmes, de rassurer et de détendre les voyageurs. Ils auraient dû finir leur service à 23h. L'un d'eux explique que les TGV ont ramené trop de neige dans le tunnel, une humidité qui aurait déréglé les systèmes électroniques. Quatre trains en panne. Ils sont en train d'évacuer les passagers, puis des locomotives iront tracter les Eurostars en panne. Combien de temps avant de sortir de ce guêpier ? Il soupire, gentiment : "six ou sept heures du matin".

2h. Tout le monde dort, plus ou moins. Les enfants recroquevillés sous les manteaux des parents sur les sièges arrière, les parents comme ils peuvent entre le volant et le tableau de bord. Lumbago à Noël.

2h30. La rame bouge ! Pour mieux reculer. Les conducteurs affables repassent. "Maintenant, c'est la préfecture qui gère, tout est bloqué." Les autoroutes aussi, paraît-il.

6h. Vraiment partis, cette fois. Il n'a pratiquement pas cessé de neiger du côté français. En Angleterre, seule une fine poudreuse parsème les bas-côtés. On longe un Eurostar, à l'arrêt. Derrière les vitres, des visages fatigués regardent passer les files de voitures. "Huit heures d'attente au quai, je n'avais jamais vu ça", conclut un employé d'Eurotunnel.

Aujourd'hui samedi, le trafic des Eurostars est à 14h totalement interrompu.

Stéphanie Maurice