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Le dernier peignage de France coule à cause des banques


ECO-TERRE - "Le dernier montage apportait cinq garanties, la banque était plus que sûre de ne prendre aucun risque. Elle a refusé le prêt, pour des raisons purement financières, de rentabilité à court terme".Et tant pis pour les 77 emplois menacés du peignage Dumortier, le dernier de France. Le maire de Tourcoing, Michel-François Delannoy, est furieux.

Malgré l'engagement de toutes les collectivités territoriales, les banques ont refusé de soutenir la trésorerie de l'entreprise,spécialisée dans l'apprêt des fibres textiles brutes. Celle-ci connaissait depuis un an des difficultés financières : à cause de la crise, ses clients ont beaucoup déstocké, donc peu commandé. "On n'a perdu aucun client", affirme Cathy Terrain, déléguée CGT. "Mais il y avait moins de travail". Le peignage a d'abord mis fin à tous les contrats temporaires. Puis a eu recours au chômage partiel. Ensuite, en septembre 2008 et février 2009, elle a licencié en tout 17 personnes. "La société existe depuis 1896, ce n'était jamais arrivé", raconte Cathy Terrain, dans la maison depuis 25 ans. Pourtant, des dizaines de peignages présents à Roubaix et à Tourcoing, à la grande époque du textile, il ne reste plus que celui-là. "Le Peignage a toujours innové, toujours investi dans de nouvelles machines. Nous avons toujours des projets de développement, nous sommes toujours prêts à organiser des essais pour la clientèle", annonce, toujours fière de son entreprise, Cathy Terrain.

Garanties solides- Depuis un an, Dumortier essaye de décrocher un prêt d'1,5 million d'euros dont elle a besoin pour relancer sa trésorerie. Les banques sont frileuses. Les collectivités locales entrent alors dans la danse. Garantissent qu'elles achèteront l'usine au coût du prêt, si elle fait faillite, pour que les banquiers soient assurés de récupérer leur capital. Le dirigeant de l'entreprise accepte le principe d'une caution sur ses biens propres. Oseo, un établissement public de soutien aux PME, contre-garantit le tout. "Il y a eu une solidarité exceptionnelle de tous les acteurs, l'Etat, les collectivités territoriales, le patronnat régional" sur le montage du dossier, assure le maire de Tourcoing.

"J'en veux aux banques"- Mais les pertes s'accumulent, le timing s'accélère. Le lundi 26 octobre, les ouvriers apprennent que l'entreprise n'a plus les moyens de leur payer leur salaire mensuel. Dernière chance avant le dépôt de bilan : que la banque accepte d'accorder le prêt. La réponse doit tomber le mardi 27 octobre dans la journée. "Nous sommes allés loin", confie le maire de Tourcoing. "Nous avons réécrit dans la nuit du lundi au mardi notre proposition. Nous devions racheter l'usine si l'entreprise disparaissait. La banque nous a demandé de la racheter au premier incident de paiement. J'ai dit oui." Mais rien n'y fera. La banque, dont le nom n'a pas été donné, refuse. "Elle aurait pourtant récupéré son capital. Mais elle voulait faire de l'argent en plus", dénonce, amère, Cathy Terrain. "Je leur en veux beaucoup aux banques. Et il n'y a pas que moi, tout le personnel aussi. L'Etat les a aidés à remonter la pente, mais elles, elles n'aident pas. Au contraire, elles font couler les PME."  Le mercredi 28 octobre, le dépôt de bilan est prononcé. Le tribunal décide de ne pas liquider l'entreprise : il lui donne six mois pour refaire surface. "Je suis persuadé de la viabilité à moyen terme de cette entreprise leader dans son domaine", réaffirme Michel-François Delannoy. Les salariés, eux, attendent le plan social annoncé : 24 d'entre eux devraient être licenciés. 

Stéphanie Maurice