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Auchan soupçonné de «discrimination syndicale»


ÉCONOMIE - Il devait créer la section syndicale CFDT à Auchan V2, un hypermarché dans la banlieue de Lille, l'un des vaisseaux amiral du groupe. Steeven Demeurisse n'en a pas eu le temps : il a reçu une lettre pour un entretien préalable à son licenciement le jour où la CFDT envoyait le courrier recommandé le désignant comme délégué syndical. Une enquête de l'inspection du travail, dont la CFDT reproduit des extraits dans un tract, vient de conclure à la "discrimination syndicale". Auchan nie farouchement.

La directrice de l'hypermarché,Cathy Collart, affirme n'avoir eu aucune idée des intentions syndicales du jeune homme. "J'ai reçu la lettre de la CFDT après que la procédure de sanction a été lancée", dit-elle. Steeven Demeurisse s'étonne : "En avril 2009, j'ai été convoqué par mon chef de secteur, il m'a dit, 'j'ai entendu des bruits de couloir, comme quoi tu voulais devenir délégué syndical pour la CFDT'. Je lui ai dit que c'était vrai." Petit détail : un salarié ne peut ouvrir une section syndicale que s'il a un an d'ancienneté. Steeven Demeurisse a été embauché le 5 mai 2008. Le 5 mai 2009, il a reçu sa lettre pour un entretien préalable à un licenciement. Le recommandé a croisé celui envoyé par la CFDT à la direction du magasin. Pour la directrice, "Steeven Demeurisse ne réalisait pas ses objectifs et ne souhaitait pas les réaliser. Il s'agit d'un licenciement pour faute professionnelle." Elle précise : "Il avait été alerté lors d'entretiens mensuels, et ceci depuis novembre 2008." L'ancien vendeur au rayon Image garde son calme, rappelle qu'il a été arrêté pour un accident du travail, "ce qui n'a pas été compté dans le calcul des objectifs, c'est ce que dit aussi l'enquête de l'inspection du travail." Cathy Collart contre :"Tous les indicateurs de résultat ne sont pas liés à un temps de présence."

Le seul reproche que voit Steeven Demeurisse, c'est sur le nombre d'extensions de garantie qu'il fallait réaliser : "Ils poussaient tous les vendeurs sur ce point-là, et même le meilleur vendeur de mon rayon n'atteignait pas cet objectif." Il s'indigne : "Mme Collart dit des choses qui doivent être prouvées. C'est pour cela que nous avons demandé une enquête de l'inspection du travail." Et il cite à nouveau la lettre de l'inspection du travail : "Sur les douze derniers mois, les résultats ne montrent aucune insuffisance professionnelle." Cathy Collart reconnaît avoir reçu le rapport de l'inspection, mais le balaie d'une phrase : "C'est un courrier d'observations, qui procède par suppositions. Il suppose qu'il y a eu discrimination syndicale, mais c'est totalement faux." Elle a envoyé sa réponse, en réfutant tous les points, le 3 septembre. Le délégué syndical CFDT central Auchan France, Guy Laplatine, soupire devant l'argumentation directoriale : "Il est le seul vendeur licencié pour ces raisons. Il faudrait expliquer ce traitement particulier. Et comment se fait-il qu'on lui ait dit tout au long de la procédure de licenciement 'tu peux revenir en arrière' ?" Sous-entendu en lâchant sa responsabilité CFDT. Steeven Demeurisse confirme la pression. Il n'a pas lâché : être délégué syndical, c'est une histoire de famille. Son père l'était et l'est toujours, dans le secteur de la Chimie.

Prochaine étape avant les Prud'hommes : la conciliation. L'accord risque d'être difficile à trouver entre les deux parties Le jeune homme veut être réintégré chez Auchan V2, ce que n'imagine pas une seule seconde la directrice. Sûr que si cela lui arrive, Steeven Demeurisse ouvrira sa section syndicale.

Stéphanie Maurice