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De gauche à droite, d'accord pour écologiser l'Europe


ELECTIONS- Concentré de campagne européenne. C'est ce que proposait ce matin le club de la presse Nord-Pas-de-Calais : le débat réunissait les principales listes se présentant aux Européennes dans la région Nord-Ouest. Une ligne de démarcation claire a émergé sur le traité de Lisbonne : ceux qui voudraient le faire disparaître (NPA, Front de gauche, Debout la République), ceux qui l'ont voté (PS, UMP, Modem), ceux qui voudraient le dépasser (Les Verts). Sinon, la nécessité de réguler l'économie et la montée en puissance de l'écologie reviennent en boucle. Avec des nuances d'importance, tout de même.

Les présents

Ils étaient sept à avoir fait le déplacement. Manquaient tout de même Marine Le Pen, pour le Front national et LO, avec Eric Pecqueur, syndicaliste chez Toyota, à Valenciennes. Il y avait là quatre têtes de liste : Gilles Pargneaux,maire d'Hellemmes, pour le PS ; Dominique Riquet, maire de Valenciennes, pour l'UMP ; Corinne Lepage, vice-présidente du Modem ; Hélène Flautre, eurodéputée sortante pour les Verts.  Le Front de gauche et NPA étaient respectivement représentées par Loïc Pen et par Pascale Montel, numéros 3 sur leurs listes respectives. En invité surprise, Nicolas Dupont-Aignan, troisième de liste en Ile-de-France, pour Debout la République. Morceaux choisis, par ordre d'intervention.

Les programmes

Gilles Pargneaux (PS) : "Notre région montre qu'il faut plus d'Europe en matière économique et sociale. J'étais avec Jacques Delors récemment, et il s'étonnait. Le silence assourdissant de l'Union européenne sur l'économique et le social devient insupportable, me disait-il. On dirait que le mot 'construction européenne' n'existe plus. On a construit la paix en Europe, on a construit le marché unique, la politique territoriale, l'euro. Et puis plus rien. Notre première priorité, c'est un grand plan de relance économique à l'échelle européenne. La récession, c'est -3% sur la zone euro, -4,5 sur l'Union européenne. Cela veut dire 27 millions de salariés européens au chômage si on ne fait rien. Nous voulons donc augmenter le budget de l'Union européenne, en lui permettant de lever un emprunt pour pouvoir peser sur les délocalisations et le développement de l'économie."

Corinne Lepage (Modem) : "Je suis d'accord sur cette notion d'emprunt. Je crois que dans le plan de relance, une part extrêmement importante doit être accordée à l'économie verte. Quand je vois que la Chine met 200 millions d'euros sur la table, et que l'Europe met seulement entre 20 à 25 millions d'euros, je suis très inquiète. L'économie verte est l'économie de demain. Je crois aussi qu'il faut augmenter le budget, pas seulement en empruntant, mais aussi en augmentant la part des états membres, en la faisant passer à 2% du PNB. Bien sûr, il faut une harmonisation fiscale, il faut des règles de gouvernance financière. Par exemple, il faut établir des distinctions entre les actionnaires, il ne peut pas y avoir les mêmes règles fiscales par un actionnaire durable et pour un actionnaire de passage, qui ne fait que se servir avant de repartir. Je crois qu'il faut aussi un renforcement politique de l'Europe. Il est en effet démocratiquement choquant que pour la signature du traité de Lisbonne, on soit passé au-dessus des désirs des citoyens.

Loïc Pen (Front de gauche) : "Je trouve qu'il y a une hypocrisie fabuleuse dans ce débat : vous avez voté [il regarde Gilles Pargneaux, PS - NDLR] un traité [de Lisbonne, adopté au parlement] qui ne vous permet pas de faire le programme que vous souhaitez. Nous nous battrons pour retirer cette signature de la France en bas de ce traité. Sinon, nous proposons un Smic européen à 60% du salaire moyen, ce qui voudrait dire en France un Smic à 1600 euros nets. Et nous voulons revoir la répartition capital-travail. Ce que dit le chef de l'Etat, la règle des trois tiers [1/3 des bénéfices pour les salariés, 1/3 pour les actionnaires, 1/3 pour l'investissement], nous ne l'avons jamais vu appliquée, mais faisons-la !

Dominique Riquet (UMP) :"Que demandent les citoyens européens ? Que l'Europe les protège contre la crise économique, financière et écologique qui nous frappe. Nous sommes pragmatiques : il faut donc une Europe mieux intégrée et plus réactive, il faut donc améliorer le fonctionnement de l'Europe, le rendre plus simple. Nous sommes d'accord pour une régulation financière. Nous pensons également qu'il faut une coopération économique entre les pays pour soutenir nos champions et en faire émerger de nouveaux en Europe. Car le monde est tel qu'il est. Je partage l'avis de Corinne Lepage d'aller vers une économie verte. Je ne crois pas à l'emprunt pour l'Union européenne, car il lui faudrait une fiscalité propre, et il y a d'autres solutions : il y a moyen de coordonner les politiques d'investissement des pays membres. Sur le plan sécuritaire, nous sommes pour une politique européenne de défense, et nous demandons que l'Europe s'arrête à ses frontières actuelles."

Hélène Flautre (Europe Ecologie - Les Verts) : "Il faut savoir que 80 à 90% des biens produits en Europe sont consommés en Europe : nous avons donc une relative autonomie. Nous voudrions que la politique économique européenne soit respectueuse des Etats du Sud, je pense par exemple à la politique de la pêche ou de l'agriculture. Face à cette crise globale, nous proposons la conversion écologique de l'économie, ce qui permettra d'avoir des emplois durables, non délocalisables, avec une activité libérée du pétrole, et plus largement des ressources fossiles, qui ont des stocks limités. L'uranium a des stocks limités, contrairement à ce qu'on voudrait nous faire croire. Cette économie écologique peut créer 10 millions d'emplois en Europe. L'Union européenne a pour l'instant un plan de relance ridicule, avec 5 millions d'euros, c'est de la gnognotte. Nous n'avons aucune chance de nous en sortir si nous attendons qui va gagner de la lutte entre les constructeurs automobiles français et allemands. Il faut promouvoir la recherche sur le moteur qui produira moins de 80g de C02 par kilomètre, et lui donner un brevet européen, ouvert à tous les constructeurs européens."

Pascale Montel (NPA) : "Nous serons les porte-parole de ceux qui luttent. Si on ne remet pas en cause la gestion capitaliste de l'Europe, on va continuer à casser notre système social. Nous voulons dénoncer tous les accords signés et repartir à zéro. Tous les mauvais coups discutés au niveau européen, nous les ferons redescendre à la base. Car à ce niveau-là, on ne parle jamais du quotidien des travailleurs, de leur pouvoir d'achat. Nous avons tout intérêt à créer des coopérations par les luttes, pour faire grandir ces luttes et changer l'Europe."

Nicolas Dupont-Aignan (Debout la République) : "Nous sommes dans un avion dont le plan de vol a déjà été signé, c'est le traité de Lisbonne. Et nous sommes tous dans la carlingue à gesticuler, à proposer plus d'écologie, plus d'humanité, alors qu'on est tous dans l'avion et qu'il a déjà décollé. Dans l'Europe à 27, notre modèle républicain est minoritaire. L'Euro est surévalué, il asphyxie totalement notre économie ; la libre concurrence non-faussée ? C'est une idéologie ultra-libérale, on est devant un Dieu vivant qui n'est pas élu. On détricote notre industrie. Je veux retourner à une Europe des nations, il n'y a pas besoin d'uniformiser ce continent. Dynamitons la commission européenne et créons des agences de coopération qui concerneront trois, cinq, huit pays sur des sujets précis. Concentrons-nous sur les quinze innovations majeures, la voiture électrique, les panneaux solaires, dont nous avons besoin, pour que nos enfants ne soient pas des gestionnaires de chambres d'hôtes dans une France transformée en parc touristique, telle que nous rêvent nos partenaires européens." 

Recueilli par Stéphanie Maurice