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La course pour stopper l'expulsion d'Ibou Touré


SOCIÉTÉ - Il est Guinéen, et il a la police de son pays aux trousses, comme opposant au régime militaire du général Lansana Conté, selon ses défenseurs. Pourtant, Ibou Touré, sans-papiers est en route vers Roissy pour être expulsé. Son avion doit décoller vers Conakry à 15h55, selon Hélène Flautre, députée européenne (Verts). A 11h30, la Cour européenne des droits de l'homme, qu'elle avait saisie, a prévenu l'élue qu'elle ordonnait «la suspension de toute mesure d'éloignement jusqu'au 7 novembre» pour Ibou Touré, le temps d'apprécier «les risques réels encourus». A midi, Hélène Flautre -qui essaie en vain de joindre la préfecture- a lancé un appel au Préfet en direct sur France 3 Lille. «C'est la course contre la montre».

On a renconré Ibou Touré hier, au centre de rétention de Lesquin. Il assure avoir dans son dossier une copie d'un mandat d'arrêt qui le vise, en Guinée. «Je suis un partisan d'Alpha Condé, qui s'était présenté à l'élection présidentielle contre le président Conté. Les militaires venaient souvent dans mon commerce pour me racketter. En 1998, un dimanche, le jour de l'élection présidentielle, l'un d'entre eux m'a frappé. J'ai vomi du sang, et il m'a laissé pour mort dans mon magasin». Il raconte avoir été secouru, puis s'être caché dans son village, à 45 kilomètres de la capitale. Quelques années plus tard, il revient à Conakry.

C'est là que les ennuis recommencent. «Je suis allée à la mosquée le jour de l'Aïd, le 26 novembre 2003. Lansana Conté devait venir. Nous étions nombreux. tout d'un coup, il y a eu des coups de fusil, des rafales de mitraillette. Les gens couraient partout. Et j'ai vu le militaire qui m'avait frappé. Il me dit : «Je croyais que tu étais mort?». J'ai été arrêté, et conduit sans jugement à la prison». Il raconte qu'il réussi à s'évader, en promettant 10.000 francs guinéens à un gardien. Il marche dans la brousse les 45 kilomètres qui le séparent de son village. «Au village, j'ai entendu à la radio que j'étais recherché, pour participation à une tentative de coup d'Etat.»

Il repart vers le Sénégal. «Sur le chemain, je me nourrissais de mangues». Au Sénégal, il trouve le moyen d'embarquer en clandestin dans les soutes d'un bateau en partance pour Marseille. Depuis, il a déposé une demande d'asile en France, refusée, puis un recours, refusé aussi. Mercredi, les services du ministère de l'Intérieur ont tenté une première fois de le mettre dans l'avion. Il s'est débattu. «Ils m'ont frappé», ajoute-t-il. L'avion est parti sans lui, et il est retourné au centre de rétention de Lesquin. Hier, on l'a rencontré pendant une vingtaine de minutes. Il marchait avec difficulté. A deux reprises, il a arrêté de parler, le corps crispé, le souffle coupé par des douleurs dans le dos.

«Le préfet doit arrêter la procédure d'éloignement», indique Hélène Flautre. elle ajoute que par ailleurs, Ibou Touré aurait dû être présenté ce matin avant 11h30 devant un juge des libertés et de la détention, puisqu'il y a plus de 15 jours qu'il est retenu.

A la préfecture du Nord, pour l'instant, on indique ne pas avoir «tous les éléments de procédure». Les services sont alertés, indique une porte-parole, «on attend leur retour».

Haydée Sabéran

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