Comparateur de rachat de crédit

Samsonite accusé de s'être fait la malle sans payer


ECONOMIE- «On espère qu’il y aura de la justice pour nous, ça se voit, quand même, que tout cela a été orchestré.» L’ancienne salariée du bagagiste Samsonite se tient bien droite, à la fin de l’audience, hier midi, au tribunal de grande instance de Béthune. Ils sont 197, sur les 203 salariés que compte l’usine d’Hénin-Beaumont, dans le Pas-de-Calais, à avoir assigné en justice leur ancien patron pour vente frauduleuse. Corinne a été licenciée en février 2007, après vingt-quatre ans de maison : elle n’a pas retrouvé de travail depuis. «Je ne connais personne qui en a retrouvé.»

L’usine a été cédée en septembre 2006 à un repreneur, Energy Plast, qui a coulé l’affaire en dix-huit mois. Sans jamais produire un seul des panneaux solaires qui devaient assurer l’avenir, mais en continuant une activité de sous-traitance pour Samsonite, sur les valises no-name (des produits sans marque) vendues moins chères.

«Maladresses». Pour les avocats des salariés, la cause est entendue : Samsonite a tenté de «se soustraire au plan social» - inéluctable dans une filiale en déficit chronique - en le faisant porter par d’autres. «Samsonite le dit d’ailleurs clairement dans une déclaration aux autorités boursières américaines, expliquant qu’elle a donné une aide à un repreneur pour assumer les social costs», s’exclament-ils.

Le bagagiste américain a bien financé la reprise, avec une subvention et un prêt de 4 millions d’euros chacun. Ce qui n’a pas empêché Energy Plast de déposer le bilan en février 2007. L’avocat de la multinationale, Me Touraille, justifie ces sommes comme une aide à la reconversion, pour pallier «le handicap d’une masse salariale trop lourde». Il affirme également que Samsonite croyait au plan de redressement, même s’il reconnaît des «maladresses commerciales» de la part du repreneur. L’avocat présente le marché des no-name comme une faveur de Samsonite, pendant la période de transition. et s’étonne que soit rejugée à Béthune une vente que la cour d’appel de Paris a estimé légale. Et distille : «Le comité d’entreprise a accepté cette reprise. S’il s’estimait mal informé, il aurait dû saisir la justice.»

Sur le parvis du tribunal, Brigitte Petit, ancienne élue du comité d’entreprise (CE), lance à ses collègues : «Vous auriez dû mieux choisir votre CE !» On se marre, jaune. «Voilà le comité d’entreprise responsable, et au bout du compte, les salariés qui ont voté pour nous», s’attriste un autre élu. «Pourtant, on s’est abstenu sur cette question.»

«Solaire». Ils évoquent les pressions : soit ils acceptaient Energy Plast, soit on les menaçait de la fermeture immédiate de l’usine, affirment-ils. A l’audience, l’un de leurs avocats, Me Rilov, insiste sur le procès-verbal d’une des réunions du comité d’entreprise. «Quand l’expert-comptable demande quels sont les investisseurs potentiels qui aideront Energy Plast à rentrer sur le marché de l’énergie solaire, le représentant de Samsonite parle de sociétés allemandes et françaises, sur qui il a promis de garder la confidentialité. Alors que c’est l’argent de Samsonite qui va être investi. La société a caché le montage financier au CE.» Une pièce dont n’a pas eue connaissance la cour d’appel de Paris. Le jugement sera rendu le 24 juin.

Stéphanie Maurice