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Delannoy tente de contenir Vanneste à Tourcoing


MUNICIPALES - La nuit tombe. Tourcoing, quartier du Clinquet, à l’heure du porte-à-porte. Il fait froid. Manteau droit, écharpe blanche, Christian Vanneste, 60 ans, député (UMP), candidat à la municipale, sonne à la porte. Une dame a quelque chose à dire. Elle n’a pas envie d’un établissement pour personnes âgées derrière son jardin : «Je ne dis pas qu’il faut pas le faire, c’est bien, mais on est quand même un quartier privilégié, il faut le rester.» Le candidat sort son calepin : «Vous êtes madame ?» Il note. «Dès demain matin, je regarde ça.» Il ajoute : «Vous n’êtes pas gênée par les rassemblements de jeunes ?» MUNICIPALES - La nuit tombe. Tourcoing, quartier du Clinquet, à l’heure du porte-à-porte. Il fait froid. Manteau droit, écharpe blanche, Christian Vanneste, 60 ans, député (UMP), candidat à la municipale, sonne à la porte. Une dame a quelque chose à dire. Elle n’a pas envie d’un établissement pour personnes âgées derrière son jardin : «Je ne dis pas qu’il faut pas le faire, c’est bien, mais on est quand même un quartier privilégié, il faut le rester.» Le candidat sort son calepin : «Vous êtes madame ?» Il note. «Dès demain matin, je regarde ça.» Il ajoute :

Eternels travaux. Plus loin, un habitant s’en plaint, des jeunes. Christian Vanneste lui promet des caméras de surveillance. Au futur, et pas au conditionnel, comme s’il était maire. Il demande : «Et il y a de la drogue ?» Voilà Vanneste. Un ton, une connivence. «Conservateur, mais pas extrémiste.»

L’élu du peuple a été condamné pour «homophobie». Ça le rend célèbre en France, mais à Tourcoing, les gens en parlent peu. Autre motif possible de célébrité : s’il est élu, une ville socialiste tombe avec ses neuf conseillers communautaires de gauche. Et la présidence de la communauté urbaine de Lille, pour l’instant à Pierre Mauroy, passe sous le nez de la maire de Lille, Martine Aubry.

Du coup, les yeux se braquent sur Tourcoing. Une ville plutôt effacée, malgré son église qui carillonne comme au cinéma, ses bobos qui retapent leurs lofts, son studio d’art contemporain, son Atelier lyrique, son projet de centre nautique, ses futurs studios de cinéma. Son centre-ville semble en éternels travaux. Ses usines vidées, 4 000 emplois perdus depuis 2003, ses quartiers populaires au cœur de la ville, en brique alignés. Ici, la moitié des habitants sont exonérés de tout ou partie de la taxe d’habitation. Jusqu’ici, la ville avait porté trois fois à la mairie le socialiste Jean-Pierre Balduyck après une triangulaire avec le Front national.

Le nouveau candidat socialiste est le premier adjoint, Michel-François Delannoy, 44 ans, père de six enfants, ancien de la Jeunesse ouvrière chrétienne, spécialiste des questions de sécurité, et chargé des questions sociales au conseil général. Il ne croit pas à une nouvelle triangulaire, avec le FN qui n’a pas passé les 10 % aux législatives de juin. Du coup, la victoire serait plus belle, mais il y a un risque. «Plus qu’un risque, s’inquiète Sylvie, une enseignante de 37 ans. Les gens veulent que ça change, mais ils ne savent pas ce qui les attend.» Nicolas Sarkozy a raflé 51,5 % des voix à Tourcoing, le 6 mai. Michel-François Delannoy se rassure en disant que Tourcoing est «comme Dunkerque, une ville historiquement à droite», où règne pourtant le socialiste Michel Delebarre.

A la sortie d’une école du quartier des Orions, Hassane, 41 ans, vendeur, et Nathalie, 38 ans, assistante maternelle, se rassurent : «ça va être dur, mais ça va aller.» Un jeune homme décrit Christian Vanneste comme une vraie menace pour les quartiers populaires : «Les socialistes n’ont rien fait, ou pas grand-chose. Les gens n’espèrent même plus. Certaines familles d’origine maghrébine vont voter Vanneste.» Retraitée, Danièle, 62 ans, se dit «pour le changement», c’est-à-dire Vanneste : «Impossible de se garer dans le centre, pas de sécurité, la circulation, c’est n’importe quoi.» Sur la sécurité, Delannoy renvoie à Vanneste : «La droite a supprimé la police de proximité, et baissé les effectifs du commissariat.»

Au second tour, le socialiste pourrait s’allier avec Michel Van Tichelen, candidat Modem, qui ne trouve plus fréquentable son ancien allié Vanneste. Dès le premier tour, le PS part avec les Verts, les communistes et le Parti radical de gauche.

Eclairage. Avec un sourire de garçon timide, Delannoy multiplie les porte à porte à coups de «bonjour, on vient voir si tout va bien», embrasse les gens, prend des épaules, rigole avec les ados. S’explique dans les réunions d’appartement, promet des rues mieux éclairées. Il a reçu le soutien de Martine Aubry, qui a fait trois fois le voyage depuis Lille, de Noël Mamère, de Bertrand Delanoë. Le maire de Paris, sur les propos homophobes de Vanneste, a traité le candidat UMP de «délinquant».

Reste l’abstention, qui fait souvent plus de mal à gauche. Elle bat des records : 48,7 % aux municipales de 2001. «J’ai voté en 2007, mais c’est fini. Je suis en galère», assure un jeune homme dans la file d’attente à la Poste.

Haydée Sabéran

Photo Cédric Dhalluin : le socialiste Michel-François Delannoy dans le quartier des Orions.