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«On lui donne les cartes, et Sarkozy, il joue»


POLITIQUE - L’ouverture à des ministres de gauche, les Français, selon notre sondage, votent pour. Petit tour chez des électeurs de gauche du Pas-de-Calais, fief de Jack Lang, député sur lequel continue de lorgner Sarkozy. «Du point de vue de Sarkozy, c’est une bonne idée», confirme Armand, architecte à Calais. «C’est habile, ça a un impact sur le public. Mais pour la gauche, c’est démobilisateur, inquiétant. Une claque.»

  Il se demande en même temps si ça ne peut pas être utile pour cette même gauche. «Un électrochoc pour se réveiller, arrêter de se disperser ?» Et si Jack Lang, son député, devenait ministre ? «Je lui fais confiance. Il a une élégance qui pourrait l’en empêcher.»

Jean-Claude (1), enseignant à Calais, avance une autre raison. «Pas assez courageux. Il faut du courage pour se mettre à dos ses copains.» L’ouverture, il n’est pas hostile. «Des gens ont envie d’apporter une contribution. Je peux comprendre. Hirsch, ça me semble logique, Amara aussi.» Un seul bémol : «Pas à l’immigration, l’économie, ou à l’intérieur. Et si une décision les choque, il faut démissionner.» Il pense que les ministres d’ouverture sont des «thermomètres. Une façon pour Sarkozy de ne pas aller trop loin. Ils l’ouvrent. Ça permet à Sarkozy de se recentrer».

Oui mais la droite, la gauche, tout ça ? Gérard, proche des Verts, qui a voté socialiste «pour éviter un schéma à la 2002», n’est pas dupe. «Sarkozy est un stratège. Il ne fait pas ça par altruisme.» Et si Jack Lang y allait ? «Ce serait pour se servir, et non pour servir. Il faut une limite, la gauche et la droite, c’est différent. Rejoindre Sarkozy, c’est se mettre au service des riches.» Jean-Claude : «Les élus de gauche, je les connais, je les côtoie. C’est fini. Ils savent même pas ce que c’est qu’un pauvre.»

Marc, enseignant retraité dans un village près de Calais, a voté Lang. On ne l’y reprendra plus. «Faut pas m’en parler, c’est comme s’il avait quitté le PS.» Pour lui, c’est d'abord celui qui a appelé à la fermeture du centre de Sangatte voisin, avec Nicolas Sarkozy, ministre de l’Intérieur. Au fond, il pense aussi que la plupart des socialistes ne sont plus socialistes. L’ouverture ? «Du bidon. Ils se fourvoient. Certains sont sincères, d’autres calculent. Les électeurs de gauche, eux, ne peuvent pas s’y retrouver. On a besoin de repères.» Les ministres d’ouverture peuvent peut-être apporter quelque chose là où ils sont ? «Un chouïa comparé aux dégâts sur la gauche, immenses.» Il reconnaît que c’est «adroit» : «Pendant qu’on parle de ça, on ne parle pas du reste, du libéralisme à tous crins qui fabrique de la misère. De la protection sociale. Du chômage qui augmente, alors qu’on nous dit qu’il baisse. Du coût de la vie et des travailleurs pauvres.» Sur ce plan-là, Jean-Claude le rejoint : «Oui, mais les responsables, c’est nous. Il n’y a rien de structuré en face. On lui donne les cartes, et Sarkozy, il joue.»

Haydée Sabéran

 

 

(1) Certains prénoms ont été modifiés.