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Les agriculteurs bloquent sur les indemnisations


POLLUTION - Tracteurs couverts de la boue des champs, brasero, baguettes et jambon blanc devant les bâtiments du Conseil général, puis de la Région : les agriculteurs ont exporté leur colère à Lille, après l'avoir manifesté en bloquant hier l'usine d'incinération d'Halluin. Ce qu'ils veulent ? Les indemnisations des quatre exploitants victimes d'une pollution aux PCB, d'origine industrielle. Du 23 mai à fin juillet, leur lait a été pollué par cette molécule cancérigène. Six mois après, les analyses des rejets de fumées de 21 entreprises et du centre de traitement des déchets n'ont rien donné. Pas de coupable, donc adieu les indemnisations. Pourtant, la facture s'élève à 60 000 euros. 30 000 euros de chiffre d'affaire en moins pour les producteurs ; 30 000 euros pour la destruction des stocks.

«On ne pouvait pas le jeter à l'égout, ce lait, avec le produit nocif qu'il contenait», explique l'un des agriculteurs touchés. «Cela coûtait 350 euros le mètre cube, de le détruire.» Paul Deffontaine, vice-président chargé des relations avec le monde agricole de la communauté urbaine de Lille, propriétaire de l'usine d'incinération, a promis hier de solliciter le conseil communautaire, pour un montant de 10 000 euros, destiné aux exploitants. Blocus de l'incinérateur levé à 21h. Aujourd'hui, l'effet blocage a eu moins de résultats : le Conseil général a décidé qu'il réfléchirait ; le Conseil régional promet d'interpeller l'Etat et ne ferme pas la porte à une aide éventuelle ; la préfecture prévoit de participer à l'effort financier et organise une réunion avec tous les services concernés le 13 décembre.

«On est assez optimiste», notait Yvan Hennion, responsable FDSEA (Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles) sur le canton d'Halluin, «même si on est très déçu de l'attitude du Département. Mais on reste mobilisé et on attend des réponses.» Attention aux promesses non tenues, le gros des troupes se tient prêt pour une mobilisation plus importante.

Auprès des tracteurs, la mise hors de cause de l'incinérateur laisse sceptique. «C'est la troisième fois que le lait est pollué, et c'est toujours les fermes les plus proches de l'usine qui sont touchées. En 1998, c'était des rejets de dioxine, en 2000, on nous a dit que c'était la pollution historique des terres, et maintentant ce sont les PCB», explique un producteur, même pas en colère, plutôt lassé. Ce qui alimente sa suspicion, c'est qu'un incident est survenu sur l'un des fours. Ce que confirme la mairie, mais en  soulignant qu'aucun lien de cause à effet ne peut être établi entre la pollution aux PCB et cet incident.

«Dans leurs analyses, ils disent que ce n'est pas eux, mais tout dépend du volume rejeté», dit un autre. «Et comme aucun seuil de rejet n'existe pour le PCB, au contraire de la dioxine, devant un tribunal, aucune entreprise ne peut être condamnée.»  Par contre, dans les produits laitiers, la concentration dioxine + PCB ne doit pas dépasser 6 picogrammes par gramme de matière grasse. Un maillon manque dans la chaîne de surveillance.

S.M.