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Élèves violents? Prof suspendu


SOCIÉTÉ - «On est quoi, nous, de la merde ?» : devant le lycée professionnel Jean-Monnet, dans le quartier des Bois-Blancs à Lille, la colère et la fatigue des enseignants déborde. Ce matin, ils se sont considérés en danger, par manque de soutien de leur hiérarchie : ils ont tous fait jouer leur droit de retrait, en solidarité avec l’un de leurs collègues, professeur de structure métallique. «Mardi dernier, pendant son cours, il a été touché à la tête par un objet en métal. Le lendemain, même classe, un élève a jeté un briquet dans la forge, ce qui aurait pu provoquer un feu. Estimant que notre collègue ne savait pas tenir sa classe, le proviseur a engagé une mesure de suspension à titre conservatoire.» C’est à dire une mise à pied, le temps de l’enquête, en cas de suspicion de faute grave ou d’infraction pénale.

Le proviseur, Pierre-André Dangréau, dans ses petits souliers, dément, : «La procédure administrative n’est pas engagée. Pendant le temps d’analyse des faits, j’ai souhaité que l’enseignant ne soit plus en face à face pédagogique avec ses élèves.» Ce que les profs ont pris pour un clair désaveu, surtout que la réunion de conciliation, hier, a tourné au procès de personne, selon eux. «Il faut comprendre les conditions de travail dans cet établissement», explique un enseignant. «Nos élèves sont très extravertis, passent rapidement à l’acte, verbalement ou physiquement. Pour garder notre croyance dans notre métier, nous avons besoin d’un cadre qui vous soutient et vous trouve des solutions.» Jets de boulons dans les couloirs, papiers enflammés, gaz lacrymogène répandu : ici, c’est du quotidien. Un élève a passé récemment la tête d’une de ses camarades à travers une vitre. «C’est évidemment le conseil de discipline. Mais, non, finalement on accorde au garçon une seconde chance. Il a fallu écrire un rapport accablant pour obtenir la sanction», se fâche un autre prof. «Ici, si tu te fais insulter par un élève, c’est de ta faute», lâche, amer, un de ses collègues. Le proviseur, lui, travaille à déminer le terrain : «La forme n’a pas été comprise, mais il s’agissait bien de protéger le collègue, en évitant la surenchère de la violence. D’ailleurs, lundi, il reprendra sa classe normalement, de la façon qu’il souhaite, accompagné d’un autre professeur ou non.» Les lycéens, eux, sont ravis, s’égaillent sur le trottoir, pas de cours, l’aubaine «Ouais, faudrait dire merci à l’élève qu’a fait ça
Stéphanie Maurice